Homélie du 2e dimanche de Pâques – 11 avril 2021 – fr Paul-Dominique Marcovits

Dimanche de la miséricorde ! Regardons ensemble la miséricorde que le Seigneur Ressuscité manifeste à ses disciples et qu’il nous donne, à nous aussi. Quelle est cette miséricorde ? C’est celle de se faire reconnaître de ses disciples. Car les disciples ne peuvent pas d’eux-mêmes le reconnaître, il faut que Jésus se révèle lui-même à eux. Ici, il montre à ses disciples ses mains et son côté. Alors jaillissent en eux la joie de croire, la foi. Cette manifestation de lui-même est la grande miséricorde du Seigneur. Regardons ensemble cette miséricorde, cette révélation du ressuscité à ses disciples le soir de Pâques et à Thomas, huit jours après.

La miséricorde du Seigneur se manifeste en trois temps.

D’abord, Jésus montre ses plaies : « Il leur montra ses mains et son côté ». Il pourrait y avoir quelque chose de terrible dans ce geste. Jésus veut-il montrer tout ce qu’il a souffert à ses disciples qui ont fui lors de son arrestation ? Veut-il leur faire reproche de leur trahison ? Nous pourrions comprendre cette attitude de Jésus. Nous voudrions nous-mêmes que celui qui nous a tant blessés voit, réalise tout le mal qu’il nous a fait. Ce serait justice et vérité. Mais est-ce pensable de la part de Jésus ? Nous aurions une religion de culpabilité, nous ne pourrions regarder la croix sans aussitôt blêmir de honte.

Mais ce n’est pas ce que fait Jésus. Il leur montre ses plaies pour leur dire, à eux et à nous, non pas : « Regardez ce que j’ai souffert à cause de vous ! » mais, mais bien au contraire : « Regardez ce que j’ai souffert par amour pour vous ! » Jésus le disait, bien avant sa mort : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Jésus est mort et ressuscité pour le salut de tous les hommes, pour nous tous ; par amour !

Voilà le premier signe de la miséricorde du Seigneur. Quel changement pour nous qui voulons suivre le Seigneur ! Que tout ce qui nous sépare, nous blesse, que tout ce qui est si dur à porter soit une occasion d’aimer davantage. Quel changement lorsque l’on a compris cela. Mais il faut du temps pour le vivre en vérité. C’est une grande conversion que de devenir miséricordieux jusque-là !

Le deuxième temps de la miséricorde manifestée par Jésus est son attitude vis-à-vis de Thomas, vis-à-vis de nous. Au moment de la résurrection de Jésus, Thomas a une place particulière parmi les apôtres : il n’était pas là avec les autres apôtres lors de ce premier soir où Jésus s’est manifesté et lorsqu’il leur a montré ses mains et son côté. Thomas n’était pas là. Ce qui est important pour nous, c’est que nous aussi, nous n’étions pas là. Qu’a fait Thomas ? Qu’a-t-il fait qui puisse évoquer l’attitude que nous aurions pu avoir ? Réponse : Thomas n’a pas vu et -voilà sa grande difficulté – il ne croit pas ceux qui ont vu et qui lui annoncent : « Nous avons vu le Seigneur ». Il ne croit pas à leur parole. Nous savons par cœur les conditions données par Thomas pour croire : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » Comme Thomas, nous n’étions pas là le soir de la résurrection et comme Thomas, nous pouvons douter de la parole de ceux qui ont vu et qui ont cru ! Nous pouvons poser nos conditions pour croire, pour suivre le Seigneur et pour nous donner tout entier à son service.

Que fait alors Jésus, comment montre-t-il sa miséricorde ? Huit jours plus tard, Jésus est là et il invite Thomas à mettre son doigt dans ses plaies. Thomas l’a-t-il fait, pour bien vérifier que c’est Jésus qui est devant lui, que c’est bien Jésus qui lui parle ? A-t-il mis ses mains dans les plaies de Jésus ? L’a-t-il fait ? De nombreux peintres ou des maîtres verriers nous donne la scène à admirer. Pourtant, il est fort probable que Thomas n’a pas accompli ce geste. Pourquoi ? Parce que Jésus ajoute, aussitôt après avoir rappelé à Thomas les conditions qu’il lui posait pour croire, aussitôt Jésus ajoute : « Cesse d’être incrédule, sois croyant. » Cette parole, cet impératif de Jésus est efficace, elle s’impose de façon décisive à Thomas qui répond aussitôt à Jésus, en ne cherchant plus à vérifier quoi que ce soit. Il dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Thomas croit. Thomas a été relevé de ses doutes. Il reçoit enfin la miséricorde de son maître comme les autres disciples l’avaient déjà reçue.

Quelles que soient les conversions qui ont marquées nos vies, le Seigneur qui se manifeste à nous – la plupart du temps de façon simple – le Seigneur nous libère. Il se fait en nous un élargissement profond, durable, définitif. Nous devenons de plus en plus nous-mêmes. Joie de croire. Joie de vivre ! Pour Thomas, c’est l’élargissement suprême : le cri qui monte de son cœur – ‘Mon Seigneur et mon Dieu’ – est la profession de foi la plus grande, la plus complète prononcée par les disciples de Jésus ; elle est aussi, pour beaucoup d’entre nous, la plus simple et la fréquente : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »

Et voici la troisième manière de Jésus pour manifester sa miséricorde et celle de son Père. Revenons en arrière car tout se noue là. Jésus manifeste une confiance totale à ses disciples, à Thomas, à nous. Jésus dit : « La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis. À qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus ». Extraordinaire confiance du Seigneur ! Son œuvre de miséricorde est remise entre nos mains. Rendre les autres libres, libres du péché, de la détresse, de l’humiliation… Rien n’est plus beau !

Voilà la grande miséricorde ! Jésus nous confie son œuvre de salut, qui est celle que le Père lui a confiée et que l’Esprit Saint va accomplir en nous. Vivre dans l’amour du Père, dans la liberté du Fils, dans la force du Saint Esprit, voilà ce qui nous est donné à croire, à vivre.

Voilà le bonheur que Jésus nous donne : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ! » Grâce à la parole des apôtres, et de tant d’autres après eux, nous croyons !

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